La nuit a été calme, mais nous avons senti que chaque voiture passant sur le chemin ralentissait beaucoup à notre proximité, et que notre présence était remarquée. Au petit matin, lorsque je sors de la voiture, un paysan est en train de descendre le chemin vers nous. C’est Anton qui vient aux nouvelles. Il m’explique (pas un mot autre qu’albanais) que ses fils sont aux USA, à Chicago et à Brooklyn. Très sympathique, il voit bien que je suis en pyjama, et que quelqu’un attend son départ pour sortir de la voiture. Il se retire donc à bonne distance, mais reste attentif à tout ce qui se passe.
En fait, il attend le minibus qui va l’emmener à Miras.Une fois notre petit déjeuner avalé, la toilette faite discrètement dans le torrent, et après une nouvelle discussion avec un homme qui mène son cheval au vétérinaire (à moins que lui ne soit vétérinaire? En tous cas, son fils à lui est à Manhattan) nous décidons d’aller voir le village perché de ce dernier.
Il s’agit de Qyteze, un hameau semi abandonné, sans route ni voiture, mais pourvu d’une petite chapelle en pierres magnifique. Dans un jardin travaille un homme qui nous hèle, et nous engageons la conversation en anglais laborieux, bientôt rejoints par sa femme. De fil en aiguille (c’est le cas de le dire, car Françoise et cette femme font des concours de couture et tricot), nous sommes invités à prendre un verre à l’intérieur de la maison. On me propose un whisky albanais (à 09h du matin!), nous acceptons un jus de fruits, et nous visitons la maison, pourvue de tout le confort, mais rustique. Le fils qui est professeur aux USA (nous n’avons pas su où) doit alimenter un peu les finances. Ce monsieur était instituteur, et sa femme au foyer est très fière de cette position et de celle de leur fils et de son frère à elle, tous professeurs. Elle nous fait les honneurs de la maison, et montre à Françoise tous les tapis (il y en a partout), les napperons, les tableaux qu’elle a fabriqués elle-même, en partant de la matière première sur le mouton. Nous pouvons voir le rouet et aussi le berceau datant de son enfance. Ces gens (lui 81 ans, elle 75 ans) sont réllement charmants, fiers de leur vie et de leurs choix. Nous nous quittons avec de grands sourires, mais sans photo, car ils n’étaient pas assez bien habillés.
Retour sur le chemin infernal, pour rejoindre Bilisht. En fait, à partir de l’embranchement où nous avons couché, la condition est bien meilleure, et la route est goudronnée à partir de Miras.
A Bilisht, notre objectif est d’acheter un peu de nourriture, de faire laver le K6, poster les cartes postales pour Tiphaine, Ombeline et Basile, et évacuer nos derniers leks en prenant de l’essence. Trouver la poste n’a pas été une petite galère, l’avenue principale de la ville étant barrée en travaux. A la fin, il nous reste 5850leks qui se transforment en 46l de gasole. Le temps de prendre en photo les transports locaux, nous voilà partis pour la frontière avec la Grèce.
40′ pour franchir, le côté albanais alors que nous avons bénéficié d’un passe-droit, les policiers ne sachant pas trop comment interpréter le CD à le fin de l’immatriculation du K6. Passage au scanner obligatoire pour les véhicules plus gros que simple berline. RAS, nous pouvons repartir. Du côté grec, c’est beaucoup plus simple. « Salut les Français, bonne route ! ».Nous déjeunons dans le lit d’un ruisseau le long de la route qui va vers Thessalonique par le nord. Nous ambitionnons de coucher au bord du lac Vegoritida et donc nous filons vers le sud pour le longer. Après 2 essais infructueux (non littéral, car nous nous sommes gavés de cerises dans une plantation) nous allons à Arnessa où il y a tout ce qu’il faut, nous dit-on. Il y a effectivement une aire organisée où 2 camping-cars français stationnent déjà. C’est à dire 4 douches sur une dalle en béton, un WC de chantier sans verrou, et surtout le lac eutrophisé n’invite pas à la baignade. Mais le paysage est sympa, et après le départ des jeunes fêtards, nous passons une bonne nuit.