Nous aurions bien voulu faire le trajet Alès – Chasseradès en train, et bénéficier des vues exceptionnelles offertes par la voie ferrée et ses nombreux ouvrages d’art. Mais il y a des travaux, et contrairement à ce que nous avait pronostiqué notre pompier avignonnais conducteur de trains, il n’y avait pas de fenêtre de passage. Tous les trajets en car.
Donc, départ de la place de la Poste à St Jean du Gard, où nous retrouvons les 2 jeunes soeurs vues plus tôt. Trajet un peu sportif, notre chauffeur étant rapide. La route tourne beaucoup et est assez étroite.
2h d’attente pour elles, 3h pour nous, nous prenons des cafés sur la place de la gare d’Alès, au soleil.
Notre car nous emmène ensuite en moins de 2h à la gare de Chasseradès, où nous attendait la voiture. Dire qu’il nous a fallu 6 jours pour faire le même trajet !
Journée moyenne, avec 6h40 de marche sur 7h30 de trajet, et 700m de dénivelé en 20km.
Le sac qui nous suit par la Malle Postale n’avait pas été prévu sur ce parcours, mais l’organisme accepte de nous le transporter au dernier moment.
Comme souvent dans ces déplacements, les places déterminées au dîner sont reprises au petit déjeuner. Cette fois-ci, les rapports sont un peu plus cordiaux, sans être plus intéressants, du moins du côté du groupe de femmes. L’homme, par contre, s’exprime un peu plus et donne une version amusante de sa situation. Il est en retraite depuis 3 mois, et un de ses amis lui recommande de randonner pour s’occuper. Il s’y applique donc avec beaucoup d’humilité, et s’excuse d’être débutant dans cette activité. Il a commencé par prendre un bus pour 30 km plus loin et rentrer chez lui à pied.
Notre hôte anime de nouveau le petit déjeuner. Cette fois-ci, nous apprenons que ses enfants arrivent ce week-end, et que le plus jeune vient pour reprendre la gestion du gîte. Cela n’a pas l’air de se présenter facilement, et nous évitons de poser trop de questions. Il nous indique un itinéraire permettant de retrouver le chemin sans avoir à retourner sur nos pas. Au détour d’une propriété, nous rencontrons enfin 2 ânes au pré. Malheureusement, le propriétaire qui leur apporte du fourrage nous informe que ces bêtes-là sont incapables de porter quoi que ce soit et n’ont jamais appris à suivre docilement un itinéraire imposé, ce sont des ânes « pour l’agrément ».
Nous rallions assez facilement St Etienne vallée française que nous visitons, rues étroites, église et temple, nous sommes en pays protestant, château avant de faire un arrêt à l’épicerie à la sortie du village. Notre hôte ne faisait pas de panier repas, sous prétexte que nous allions traverser des villages avec des magasins. Un peu dommage que nous n’ayons pas été plus attentifs, nous sommes entrés chez Vival, alors qu’une épicerie locale est ouverte 100m plus loin.
Nous déjeunons au col St Pierre, au soleil, juste avant le départ du nouveau tracè du chemin qui évite de marcher sur la route, mais qui suit les crêtes, assez rudement. Au moment de repartir, nous revoyons nos amis avignonnais qui ont mangé de l’autre côté du col. Et nous faisons de nouveau route commune en devisant agréablement. Nous apprenons qu’ils sont retraités SNCF, tous deux conducteurs de trains, TGV et fret. Grandes discussions sur les trains, les pompiers, bref, nous ne voyons pas le temps passer, alors qu’il y a pas mal de montées et descentes.
Nous passons quand même une borne marquant notre arrivée dans le Gard quelques kilomètres avant St Jean du Gard.
Nous nous quittons à l’entrée de St Jean du Gard puisque nous ne sommes pas dans le même gîte. Ils vont marcher jusqu’à Alès où se trouve leur voiture. Nous logeons dans l’hôtel l’Oronge au centre de la ville.
C’est dimanche de marché « biodiversité » à St Jean du Gard, et l’avenue de la gare est coupée par les étalages. Nous faisons notre entrée à l’hôtel et vérifions que nous pourrons prendre un bus pour Alès le lendemain, suivi par un vrai train pour Chasseradès. En effet, c’est période de vacances, et il y a des travaux sur la ligne, il y a donc beaucoup moins de trains. Mais finalement, tout va bien, et nous ressortons pour voir le marché qui a disparu entre-temps, chassé par la pluie. Il n’y a pas grand’chose à faire à St Jean du Gard le dimanche apparemment, quelques jeunes zonent désœuvrés. Nous rencontrons encore 1 randonneur lyonnais qui travaille dans le financement de grands projets avec lequel nous avions fait un bout de chemin. Puis se joignent à nous un père et son fils qui faisaient le chemin partiellement en autonomie sous la tente. Tous ces gens continuent demain jusqu’à Alès. Nous arrêtons la randonnée à St Jean du Gard, car il est difficile de faire déposer notre sac suiveur dans un lieu où nous n’avons pas de réservation, et nous ne coucherons pas en gîte demain puisque nous rentrons chez nous. Dîner dans le restaurant de l’hôtel, grand style.
Journée longue, 6h15 de marche pour un total de 8h, 23km avec 460m de dénivelé.
Nous étions 3 groupes de 2 dans le gîte, avec un couple de Bordelais de notre âge dont le monsieur semble relever difficilement d’un AVC, et 2 jeunes femmes dont nous avons appris qu’elles sont sœurs. Discussion très ouverte au dîner, sans vraiment entrer dans les sujets qui pourraient fâcher. L’une des sœurs est sommelière dans un grand restaurant du Cantal, et l’autre rêve de monter une exploitation agricole mais pas de reprendre la ferme des parents dont leur frère s’occupe aujourd’hui. Le couple bordelais voyage localement avec un âne, Grim, qui semble docile et familier. Les hôtes sont professionnels et tiennent ce gîte depuis 16 ans, madame vient de la finance et se demande tous les jours pourquoi elle reste là, et le mari plus vieux, fait le service. La chambre est très grande, peut recevoir 7 personnes, mais nous sommes seuls pour profiter d’une très belle salle de bains. Sitôt le petit déjeuner avalé et les paniers repas mis en sac, nous voilà partis sous le crachin matinal. La pelouse magnifique hier à notre arrivée a été labourée pendant la nuit par les sangliers.
Peu de photos encore aujourd’hui, le temps ne permettant pas d’avoir les appareils à la main. Le gîte n’était pas sur le chemin de Stevenson, il nous faut faire un parcours de raccordement, et au moment où nous rejoignons le chemin, nous retrouvons nos 2 amis Avignonnais. Nous marchons ensemble deux bonnes heures sans voir le temps passer dans le brouillard.
Les filles nous doublent et un jeune homme déjà vu au mont Lozère aussi. Nous déjeunons en bordure d’un village de vacances,bien situé avec une très belle vue sur les Cévennes, qui semble fermé, nous saurons le soir qu’il est en rupture d’exploitation, le gérant ayant été pris les deux mains dans la caisse. La vue s’est dégagée le temps du déjeuner.
A notre arrivée à st Germain, nous retrouvons tout ce monde-là attablé au bord de la route au bistrot du village. Grande conférence sur le moto-ball, un sport que nous ignorions complètement et que pratique l’un de nos 2 papis avignonnais. Une statue réalisée par une Iranienne qui a séjourné quelques années au village trône sur la place principale. Il y a peut-être un problème de proportions quelque part…
Nous nous devons encore parcourir 6km pour rejoindre notre nouveau gîte, une vieille maison cévenole au bord du Gardon au pont de Burgen. Là, un groupe de 4 femmes se pressent devant la cheminée, et un homme est installé dans une chambre au 1er étage. Dîner animé par notre hôte qui n’est pas local mais qui habite ici depuis 40ans et a lancé l’activité de gîte dans la région au moment où personne n’osait parier sur ce sujet. Le gîte est aménagé simplement, mais est très agréable. Histoires locales, évolutions sociales, protestants, chasseurs, hippies, etc, notre hôte est très intéressant.
La journée contraste fortement avec celle d’hier, tant par le parcours que par la météo, avec du crachin permanent. C’est un une distance de seulement 19km, avec 428m de dénivelé que nous avons effectué en 4h45, en tout 5h50 de voyage.
Presque dès le départ, un crachin s’installe, nous obligeant à nous protéger de l’humidité : cape de pluie obligatoire, donc appareil photo dans le sac, puisqu’il faut tenir les bâtons de marche.
Environ 1km après le départ du pont neuf de Florac, un vieux pont nous donne accès au sentier qui grimpe raide dans la colline.
La végétation a changé, nous marchons sous des châtaigniers. Certains sont vieux très vieux même et donnent à voir de très belle souche. D’autres présentent au milieu des branches mortes un rameau qui tend ses bourgeons vers le ciel.
Un peu plus loin dans la forêt, nous sommes rattrapés par un groupe que nous avons déjà rencontré plusieurs fois depuis Chasseradès, où nous avions passé la nuit dans le même gîte. Mais alors qu’ils étaient 3 au départ, ils ne sont plus que 2, Véronique et Jérôme, voisins à Rezé. Ils sont accompagnés par un jeune déjà rencontré aussi dans la montée au mont Lozère.
Cette journée se passe donc sous le signe de l’échange, beaucoup de conversations dans des configurations multiples, sur des sujets extrêmement variés. Ceci nous fait oublier la pluie, la marche et nous avançons à bonne allure.
Les photos sont rares à cause de la météo. La deuxième moitié du parcours se déroule sur une ancienne voie ferrée désaffectée. Nous faisons une halte à l’abri de la pluie à la sortie d’un tunnel, étonnés d’avoir parcouru les 9/10émes de notre étape avant midi.
Après un café pris ensemble à l’ancienne gare à l’entrée de Cassagnas, nous nous quittons devant le « Mimentois », le gîte où nous avons fait notre réservation. Demain, nos amis repartent à Nantes, alors que nous continuons toujours à pied en direction de St Jean du Gard.
Aujourd’hui, c’est un parcours de 28,3km, avec un dénivelé de 700m pour théoriquement 7h de marche, donc une journée de 8h. Mais nous allons découvrir que le gîte est au sud de Florac, et qu’il va falloir faire en tout 31km et que cela va nous prendre 8h. Et donc arrivée à l’hôtel du pont neuf à 18h45, bien fatigués.
Le serveur de l’hôtel nous avait prévenus : les camions ne passent pas le pont. D’ailleurs, il y quelques années, un camion étranger, arrivé au pont de Montvert grâce à (à cause de ?) son GPS, a bloqué le village une journée entière, coincé à l’entrée du pont par une manœuvre maladroite de son conducteur. Il avait fallu attendre un autre conducteur local pour dételer la semi-remorque et sortir le camion de l’embarras. Eh bien, nous avons pu voir par nous-mêmes que la livraison des denrées de base dans le village est vraiment acrobatique à cause de ce pont qui défend farouchement le vieux village.
Celui-ci est arrivé là en marche arrière.
C’est sur ce pont dit des « camisards » que se sont combattus camisards et agents du roi pour défendre leur foi au début du XVIII ème siècle.
Une fois le pont passé (à pied, et malgré le camion), le chemin part très vite dans la montée, à un rythme soutenu, au point que les 2 premiers kilomètres nous prennent 52mn. Heureusement que la suite est sur le plateau, parce qu’il reste en fait 29km à parcourir !
La fin de cette montée se fait dans une zone où l’ONF abat des arbres, et nous sommes suivis par le chant grinçant des tronçonneuses. En fin de matinée, nous passons devant des groupes de randonneurs déjà vus qui nous repassent devant lors de notre halte. Chacun reste concentré, l’étape est éprouvante.
Sur le plateau, l’habitat se cache dans les replis de terrain, à l’abri du vent.
Le chemin de ce jour est quelquefois très agréable, comme ici, mais il y a une descente en faux-plat de plusieurs kilomètres sur une route forestière qui casse les genoux et tale les doigts de pied.
L’arrivée sur Florac se fait par le village de Bedouès, où l’on peut admirer les magnifiques peintures intérieures superbement restaurées de la chapelle saint Saturnin.
C’est un parcours de 21,5km et 685m de dénivelé que nous allons effectuer en 7h40 pour 6h30 de marche.
Au départ, il faut quitter l’hôtel de la Remise et prendre en face la route qui monte vers le centre du village. Nous sommes accompagnés par 2 retraités ardèchois qui constatent amèrement que « l’Epahd se remplit au fur et à mesure que l’école se vide » et questionnent l’avenir de ce village en dehors des résidences secondaires et des randonneurs. Le centre du village est joli, avec de vieilles maisons en granite, mais la partie Epahd-maison médicale beaucoup moins.
Ensuite, le chemin grimpe dans les bois, d’abord très raide puis plus agréable dans les plantations de sapins. On atteint le sommet du mont Lozère en moins de 3h. Et là, le vent d’est est glacial. Nous ne restons pas, et repartons dans la descente où la forêt nous protège du vent. Le sentier est très agréable, et nous pouvons nous arrêter dans un endroit sympa pour le déjeuner, avec une vue panoramique vers le sud.
La température monte et rend inutile les coupe-vents. Nous traversons des petits villages avec des exploitations agricoles, et rencontrons les vaches d’Aubrac. Plutôt des taureaux d’ailleurs, dans ce cas.
La fin de la descente est plutôt rocailleuse mais ne présente pas de difficulté. Le pont de Montvert nous accueille, joli village niché sur les bords du Tarn. L’hôtel des sources du Tarn nous attend, moins moderne que la Remise du Breymard, mais le dîner nous a permis de faire la connaissance du maître d’hôtel qui vaut le voyage à lui tout seul. A la fin du repas, nous n’ignorons rien de la vie locale.
6h pour 4h50 de marche, 19,4km et 565m de dénivelé. Temps clair le matin, plus ennuagé l’après-midi.
Le gîte de Chasseradès les Airelles est grand, bien aménagé, et Véronique et Fred sont des hôtes attentifs et bien organisés. Nous avons rencontré des Nantais qui avaient déjà une journée de marche dans les pattes, et deux jeunes femmes de Romans. Nuit calme.
Départ du gîte vers 9h après avoir dûment laissé notre gros sac dans l’entrée avant 8h. Il est parti avant nous avec le véhicule de la Malle Postale. Comme tout le monde prend le petit déjeuner à la même heure, nous nous retrouvons souvent sur le chemin, et faisons des tronçons ensemble. Cela permet de faire connaissance et d’échanger des expériences.
Le village de Chasseradès est ancien, les maisons en pierre sont groupées autour de l’église. Le train passe et s’arrête ici. La voie est protégée des congères de neige, et les collines nécessitent pas mal d’ouvrages d’art.
Nous avons déjeuné aux sources du Lot (sic, parce que nous n’en avons vue qu’une). Le temps se couvrant, nous ne traînons pas et finissons notre journée passablement fourbus à 15h à l’hôtel de la Remise au Bleymard, où notre sac nous attend. Accueil sympathique, dîner copieux et savoureux.
En mai 2018, nous étions 5 randonneurs (majoritairement randonneuses) à s’élancer depuis le Puy pour une semaine de marche en suivant le chemin de Stevenson. La météo ne nous avait pas été très favorable, avec souvent de la petite pluie bien mouillante.
Cette année, nous ne sommes que 2 à partir de Chasseradès pour effectuer la moitié sud du parcours, en espérant avoir moins de pluie.
Nous déplaçons le K6 pour nous mettre à pied d’œuvre pour une montée à un sommet choisi au hasard. Celui-ci a un névé juste sous le sommet. Montée dans les alpages, il n’y a aucun sentier. De temps en temps, une yourte et le campement avec beaucoup d’enfants jouant dans les champs qui nous interpellent dans des langues que nous ne pouvons pas comprendre.
A un moment, nous repérons un cheval qui se découpe à contre jour sur le ciel au dessus de nous. Un peu plus tard, alors que nous croyons le rejoindre, nous le voyons monter exactement dans la trajectoire que nous avons choisie. C’est un cavalier avec 2 chiens. Pause déjeuner, puis nous atteignons le sommet.
Il ne fait pas très beau, les nuages s’accrochent aux sommets. Le panorama est grandiose, nous voyons le cirque complet à 360°, il y a de la neige tout atour. En bas, le lac est une grande étendue plate et brillante. Nous décidons de redescendre par la même itinéraire vers le K6 qui ne représente plus qu’un pixel dans le paysage. Et nous croisons le cavalier qui de loin nous demande de quel pays nous venons, et qui passe sans s’arrêter après nous avoir souhaité bon voyage. Dans le vallon voisin, les troupeaux commencent la descente.
Les bergers à cheval les poussent, sans chien. Deux grands troupeaux de plus de 100 bêtes. La descente sera longue. Nous atteignons le K6 en fin d’après-midi. Il faut déjà songer à trouver un endroit pour la nuit. Comme nous ne souhaitons pas dormir à 3000m, nous prenons le chemin de la descente ; via le col Moldo Ashuul.
Route non asphaltée, descente rapide sur elle-même et vertigineuse dans un paysage alpin très escarpé. Nous trouvons un coin très sympa un peu à l’écart de la route, dans un pré près du petit torrent qui ne fait pas trop de bruit. Toilette facile et nuit calme. Des voitures et des camions descendent du lac dans la soirée.
Philippe Boizeau nous a recommandé le parc naturel de l’Ala-Archa qui est dans la vallée voisine. Nous redescendons jusqu’à l’entrée de Bichkek faire quelques courses et remontons cette vallée un peu à l’ouest. Entrée du parc payante, et tout le monde semble payer le même tarif. Dans le parc, pas de bétail. Un panneau déclare qu’il existe dans le parc des lynx et des léopards des neiges, ainsi que des aigles. Nous n’avons rien vu de tel, mais il faut dire que nous avons rencontré beaucoup de monde, et notamment, beaucoup de Français. Au point qu’un Polonais, sans même nous avoir beaucoup parlé, nous a dit que nous étions Français. « statistiquement » a-t-il précisé.
Aujourd’hui encore, nous avons eu trop d’ambition, notre objectif était de monter au-dessus du refuge de Ratsek, mais cela faisait 1500m de dénivelée, et nous ne sommes partis une fois de plus qu’à 11h. Nous avons calé après 1200m d’ascension à 3200m d’altitude, 300m sous le point de vue. Cela s’améliore, mais ce n’est pas encore la grande forme. Une grande paroi de glace nous faisait face de l’autre côté de la moraine que nous avons grimpée, mais les glaciers étaient cette fois encore trop haut pour nous.
Il a donc fallu redescendre et trouver un emplacement pour la nuit dans le bas du parc, car nous voulons faire une autre balade le lendemain. Nuit dans le lit du torrent, avec le bruit furieux des eaux blanches.